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L’histoire des femmes en Valais : statuts, rôles et pouvoirs du XVIIe siècle à nos jours.

Colloque historique scientifique  L’histoire des femmes en Valais : statuts, rôles et pouvoirs du XVIIe siècle à nos jours.

Le colloque a réuni le 29 avril plusieurs historiens-nnes, sociologues, anthropologues, historiens-nnes de l’art et écrivains, à la HES-SO de Sierre. Cette journée de conférences  a permis de dresser un bilan de l’état de la recherche sur les femmes en Valais et  d’illustrer les fondements d’une thématique encore peu explorée dans ce canton. Bien que longtemps privées de droits juridiques et civils, les Valaisannes ont été, elles aussi, actrices des changements et de l’évolution du Vieux-Pays. C’est ce qu’a mis en lumière ce colloque interdisciplinaire afin d’écrire, à l’avenir, une histoire valaisanne qui tienne compte de la contribution féminine au développement social, économique et politique du canton.

La moitié invisible de la préhistoire

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Comprendre ! Tel fut le mot qui me permit de découvrir que l’homme préhistorique était aussi une femme ! Comprendre que cette constatation, pleine de bon sens, n’a guère effleuré les préhistoriens, pour qui la question de la femme est longtemps restée marginale dans les enquêtes sur cette période. Concrètement, c’est « l’homme préhistorique », artisan, chasseur, artiste, conquérant qui a surtout alimenté les débats scientifiques.

La femme, elle, fut souvent considérée comme tristement passive et reproductrice, et livrée aux fantasmes, aux mythes inspirés de la Bible ou aux lieux communs colportés depuis le XIXe siècle. Il est d’ailleurs intéressant de remarquer à ce propos que les femmes dans la religion catholique durent et doivent toujours en premier lieu être fidèles et fécondes, et qu’elles sont toujours, à des degrés variables, reléguées à un statut social globalement secondaire.

Des décennies durant, les archéologues n’ont livré dans leurs reconstitutions et leurs récits que l’image du héros mâle fourbissant ses armes et poursuivant indéfiniment le gros gibier. Il est ainsi réjouissant de constater l’intérêt nouveau pour l’existence des femmes depuis les époques reculées du paléolithique. La célébrité de Lucy en est la preuve.

Partant de ce constat, il est intéressant de relever qu’en 2013, la RTS a eu la bonne idée de créer une série de quatre films autour de six personnalités ayant marqué l’histoire suisse : Werner Stauffacher, Nicolas de Flue, Hans Waldmann, Guillaume-Henri Dufour, Stefano Franscini et Alfred Escher. Malgré le fait que les femmes représentent 50% de la population, aucune ne fut considérée comme digne d’avoir marqué les 600 ans d’histoire retenus, à savoir de la naissance de la Confédération, au XIIIe , à l’avènement de la Suisse moderne au XIXe siècle ! Nous pouvons affirmer que les têtes pensantes ayant conçu et imaginé ces séries se situent dans la droite ligne de ce qui se passe depuis que l’écriture existe : les textes fondateurs (les mythologies, la Bible, le Coran, les lois, etc.) ont été écrits par les hommes pour les hommes, les femmes n’y ont aucune place, sinon celle de procréatrice et de servante.

En 2013, il semble qu’on en soit encore au stade de la préhistoire : les femmes n’existent pas ou on les nie. Le choix de ces six personnalités fut décidé par une commission de quatre journalistes et historiennes et historiens de la Suisse alémanique, du Tessin et de la Romandie, comprenant deux hommes et deux femmes… ce qui me laisse songeuse… L’histoire n’est pas un monolithe. Chaque époque revisite son passé par rapport à ses nouvelles connaissances et valeurs. Il est évident que si l’on ne s’intéresse qu’aux chefs de guerre (trois sur six dans la série en question) ou aux pionniers de l’industrie, on ne trouvera que des hommes.

En revanche, si l’on s’intéresse au peuple, on trouvera autant de femmes que d’hommes. Or, ce sont les peuples qui sont la chair de l’histoire. De tout temps, les femmes et les hommes ont cohabité, se sont côtoyés dans la sphère privée comme dans la sphère publique. C’est donc un mélange, une mixité qui va au-delà des seuls critères amoureux, sexuels, familiaux. On y retrouve l’amitié, l’échange de savoir, le contact et donc la coéducation. Une histoire attentive aux deux sexes pourrait faire surgir de nouveaux objets et permettrait d’en réévaluer d’autres considérés comme anecdotiques : l’intime, les émotions, le corps, les sexualités, l’amour, la maternité… Elle suggérerait que le privé fait également partie des faits historiques. Les enjeux liés à la reproduction et à la maîtrise de la fécondité ont toute leur place dans l’enseignement de l’histoire sociale et politique.

L’association Via Mulieris, créée en août 2014 dans le cadre des célébrations du bicentenaire de l’entrée du Canton du Valais dans la Confédération, vise à encourager les recherches menées sur et par les femmes en Valais. Il faut souligner le travail accompli depuis lors par les fondatrices, qui ont pris le parti de combler les silences de l’histoire et de mettre en valeur la part féminine de la société valaisanne. La concrétisation de ce travail par la publication des Annales valaisannes 2017 est la preuve concrète du travail accompli et sera un outil de référence essentiel pour les jeunes générations. En conclusion, je citerai Karen Blixen (écrivaine aventurière et journaliste danoise), qui écrit en 1953

 : « Je sais la dette contractée envers les vieilles féministes, maintenant dans leur tombe. Si, dans ma vie, j’ai pu poursuivre des études, faire ce que je voulais et comme je le voulais, si j’ai pu voyager seule autour du monde, si j’ai pu faire librement publier mes idées et même si je peux aujourd’hui parler à ce pupitre, je le leur dois, et il est peu de personnes que j’honore et respecte davantage. Je sais que, pour obtenir de pareils biens au bénéfice des générations de femmes à venir, elles ont traversé bien des épreuves et renoncé à plus encore, qu’il leur a fallu supporter scandale et ridicule, et que, sans interruption, elles ont dû combattre préjugés et méfiance. »

Aujourd’hui, ces mots je les fais miens.

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Colloques

La longue lutte des valaisannes pour exister dans l’histoire.

Par Christine Savioz  03.05.2017, 13:23 Actualisé le 03.05.2017 à 17:00

EGALITE Un récent colloque sur l’histoire des femmes à Sierre a permis de constater que les historiens ne les ont prises en compte qu’à partir de la fin de la deuxième guerre mondial.

«Il faut que ce soit les femmes qui parlent de l’histoire des femmes, car ce sont elles qui le font le mieux», s’exclame avec conviction Marie-France Burnier Vouilloz. Cette historienne était l’une des intervenantes du colloque sur l’histoire des femmes organisé par «Via Mulieris»  – une association créée en 2014 à la veille du Bicentenaire – récemment à Sierre. Deux cent trente personnes ont suivi les nombreuses conférences qui ont abordé différents thèmes.

Les femmes, les grandes absentes de l’histoire jusqu’en 1946

1903: Plusieurs générations de femmes dans la famille Pont à Saint-Luc© Médiathèque Valais Martigny

Les femmes n’ont existé pour les historiens qu’à partir de la fin de la deuxième guerre mondiale. «Auparavant, l’histoire ne s’intéressait qu’à l’événementiel, comme les batailles et les traités; c’était alors exclusivement masculin. Il y avait très peu d’intérêt pour l’histoire sociale», explique Marie-France Burnier Vouilloz. Depuis lors, la gent féminine ne cesse de se battre pour l’égalité des droits et des chances.

1909: Cours de cuisine à l’école ménagère de Monthey. Cette photographie a été présentée à l’Exposition cantonale de Sion. © Médiathèque Valais Martigny / Pantaleon Binder

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https://www.lenouvelliste.ch/articles/valais/canton/la-longue-lutte-des-valaisannes-pour-exister-dans-l-histoire-667813

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Colloques, Médias et publications

Femmes valaisannes: leur histoire enfin racontée

L’association Via Mulieris cherche à valoriser le rôle des femmes dans le développement du Valais. Son colloque du 29 avril réunira plusieurs historiens.

Il n’y a pas que dans le canton du Valais que l’histoire se raconte au masculin. C’est une constante, notamment dans le monde occidental. D’ailleurs, pour mettre fin à l’omerta qui recouvrait leur rôle, les historiens français Georges Duby et Michelle Perrot ont eu besoin de quatre volumes pour raconter l’Histoire des femmes en Occident de l’Antiquité au XXe siècle, (Plon, 1991), s’interrogeant, non sans ironie : « Vouées au silence de la reproduction maternelle et ménagère, dans l’ombre du domestique qui ne vaut ni d’être compté ni d’être raconté, les femmes ont-elles seulement une histoire ? »

Donc oui, les femmes ont une histoire et même mieux : elles font partie de l’histoire avec un grand « H »!

Dans le canton du Valais, elles ont joué un rôle essentiel, dans l’agriculture notamment. « De l’entre-deux-guerres jusque dans les années 1960, beaucoup d’agriculteurs alpestres sont partis travailler dans les usines ou dans le bâtiment (construction des barrages et des tunnels), relève l’historienne Elisabeth Joris. Les femmes ont alors pris le relais et se sont occupées du bétail et d’une grande partie des travaux alpestres et des champs. » Voilà pourquoi la Valaisanne Maryline Morard, issue d’une famille de paysans de montagne, a suffoqué en 2015, en découvrant que les préparatifs prévus pour le bicentenaire de l’entrée du Valais dans la Confédération ne faisaient aucun cas du rôle des femmes. Elle a donc créé l’association Via Mulieris pour y remédier et favoriser des recherches historiques sur les Valaisannes, afin de valoriser leur rôle. « Il m’a paru essentiel que ces «grandes muettes» de l’histoire soient mises en valeur : à l’instar de leurs compagnons, elles ont été partie prenante de l’ouverture de ce canton. »

Les Valaisannes ont eu d’autant plus de mérite que, de par sa configuration géographique, ce canton a été plus qu’ailleurs enclin au repli identitaire. Ce qui a permis aux partis conservateurs et à l’Eglise catholique de maintenir longtemps les femmes dans la soumission masculine et l’oppression quand elles « s’égaraient ». Le nombre de mères célibataires qui ont dû, jusque dans les années 1960, fuir le Valais pour échapper à la vindicte de leur village …

« Les femmes ont plus qu’ailleurs en Suisse romande souffert de cette attitude conservatrice », relève Maryline Morard. Une preuve ? En 1981, les Valaisans ont été les seuls Romands à rejeter le nouvel article constitutionnel visant à inscrire l’égalité en droit et en fait de l’homme et de la femme dans la charte fondamentale. Le peuple et les cantons avaient répondu «oui» à plus de 60 % quand les Valaisans, et plus précisément tous ceux du Bas-Valais, avaient rejeté cet article sur l’égalité à plus de 54 % !

Le rédacteur en chef du Nouvelliste s’était même fendu, alors, de ce commentaire : « Le bon sens a prévalu dans le Valais », s’exclamant à propos du « oui suisse » : « Maintenant on peut s’attendre à tout. A commencer par la destruction du mariage. »

Le colloque organisé par Via Mulieris entend rendre justice aux femmes du Valais.

Véronique Châtel

Source: https://www.generations-plus.ch/?q=magazine/loisirsmaison/histoire/femmes-valaisannes-leur-histoire-enfin-racont%C3%A9e

https://youtu.be/Ld2TWzL6LZA
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Valais où sont les femmes

L'affiche du colloque "L'histoire des femmes en Valais" à la HES-SO de Sierre. [via-mulieris.ch/colloque-2017]

https://player.rts.ch/p/rts/portal-detail?urn=urn%3Arts%3Aaudio%3A8540159&autoplay=true&start=0

Versus-penser, 27.04.2017, 09h11

Par Nicole Duparc et la collaboration de Nicole Corpataux

Rts versus-penser 27.04.2017 9h11

Longtemps privées de droits juridiques et civils, les Valaisannes ont été pourtant, elles aussi, actrices des changements et de l’évolution du canton. Comment leur permettre de se réapproprier leur histoire? Quel bilan dresser de l’état de la recherche? Comment illustrer les fondements d’une thématique encore peu explorée? C’est ce que propose de mettre en lumière le colloque interdisciplinaire « L’histoire des femmes en Valais. Statuts, rôles et pouvoirs du XVIIème siècle à nos jours », afin d’écrire une histoire valaisanne qui tienne compte de la contribution féminine au développement social, économique et politique du canton.
Avec en direct Maryline Morard, présidente de l’association Via Mulieris et l’historienne Marie-France Burnier Vouilloz.

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